vendredi 12 décembre 2008

Quelques âneries merdiatiques en marge de l'« affaire Virgin Killer »

Pochette originale de l'album Virgin Killer [en] des Scorpions, paru en 1976
Image copyrightée sous fair use
Loin de moi l'idée de revenir sur le fond de l'« affaire Virgin Killer [en] », du nom de la page Web de la Wikipédia en anglais censurée, ces jours derniers, par divers fournisseurs d'accès britanniques, pour cause d'apparition de ladite page sur une liste noire tenue par l'Internet Watch Foundation, organisme privé censé lutter contre la pornographie enfantine.

Astrid Girardeau, par exemple, ou encore David Monniaux, ont parlé avec compétence de cette affaire, d'une manière somme toute professionnelle, même si, au moins pour le second, le journalisme n'est pas sa profession (ce qui explique peut-être, justement, son souci de recherche, qui l'a conduit, depuis le début de la semaine, à consacrer pas moins de cinq billets à cette affaire).

J'ai plutôt envie, à cette occasion, de m'attacher à relever quelques âneries proférées par les merdiats (souvent avides de sensationnel, par ailleurs).

Prenons d'abord l'Agence France-Presse (en passe de devenir ma bête noire, aux côtés du site lemonde.fr et du « quotidien de référence », Le Monde, dont il est l'émanation, même s'ils ont des rédactions indépendantes).

La plus récente dépêche de l'AFP sur le sujet, titrée « Une page Wikipedia bloquée en début de semaine à nouveau visible », a été publiée mercredi 10 décembre. Si, à la différence d'autres articles vus ailleurs, elle ne parle pas d'un blocage de l'accès à l'image (que les censeurs britanniques n'auraient jamais bloquée, si j'ai bien suivi l'affaire, se contentant de bloquer stupidement l'accès à l'article sur lequel était affichée l'image), la dépêche de l'AFP n'en contient pas moins de grossières erreurs :
  • Les inexactitudes commencent dès le titre de la dépêche – « Une page Wikipedia bloquée en début de semaine à nouveau visible » –, puisque le blocage de la page consacrée à l'album Virgin Killer n'a pas eu lieu « en début de semaine », mais probablement le samedi 6 décembre [en], soit au lendemain de l'inscription de l'article Virgin Killer sur la liste noire de l'IWF, intervenue vendredi 5 décembre [en].
  • Ensuite, on passe à la première phrase de la dépêche, qui commence par « Un organisme britannique de contrôle de l'internet est revenu sur sa décision de bloquer l'accès [...] », qui est idiote, puisque ce n'est pas l'IWF qui bloque l'accès (il n'en a pas techniquement les moyens), mais les fournisseurs d'accès britanniques liés à cet organisme, qui n'est là que pour recevoir les plaintes et dresser la liste noire à laquelle se réfèrent ensuite les FAI.
  • La page qui a été bloquée n'est pas « une page Wikipedia dédiée au groupe de rock allemand Scorpions » mais une page consacrée à l'album Virgin Killer, publié en 1976 par les Scorpions, ce qui n'est pas du tout la même chose, l'article consacré au groupe n'ayant jamais été bloqué.
  • L'erreur de désignation de l'article bloqué est répétée dès le second paragraphe, dans cette formule : « placé le week-end dernier la page de Wikipedia consacrée au groupe Scorpions sur liste noire ».
  • Un peu plus loin, on trouve aussi ce morceau de phrase  « La Fondation Wikimedia, dont fait partie Wikipedia », tout à fait inexact, puisqu'il peut laisser à penser que le contenu des projets Wikipédia appartiendrait à la Wikimedia Foundation, ce qui n'est bien sûr pas le cas. La fondation est simplement propriétaire de la marque Wikipedia et des serveurs qui hébergent les 250 versions de l'encyclopédie en diverses langues. Qu'il y ait, en raison de l'« architecture informatique », un lien fort entre les projets Wikipédia et la Wikimedia Foundation est une chose, mais il serait bon de décrire les choses telles qu'elles sont.
Il y a aussi Ti-Effe-Ouanne/Elle-Scie-Aïe qui se distinguent, cette fois en bombardant, sur leur site commun tf1.lci.fr, « Sue Gardner présidente de la Fondation Wikimedia », dans un article de Fatoumata Bakily, titré « Wikipedia : la censure qui fait de la pub », publié jeudi 11 décembre.

Or, Sue Gardner n'est qu'une « simple employée », salariée de la Wikimedia Foundation, certes cadre de haut rang, qui porte le titre de directeur exécutif [en] (Executive Director). La Wikimedia Foundation, quant à elle, est présidée par un bénévole, Michael Snow, portant le titre de président du conseil d'administration [en] (Chair of the Board of trustees).

Notons que, parallèlement, l'article de tf1.lci.fr indique aussi que « la page de l'encyclopédie en ligne Wikipedia consacrée au groupe de rock, Scorpions a été interdite d'accès [...] ».

N'en jetons plus : je suis persuadé que, rien que pour cette stupide « affaire Virgin Killer », on pourrait citer des dizaines d'approximations, erreurs et contre-vérités glanées dans les merdiats, censés informer le consommateur, et non l'égarer, par incompétence, paresse ou bêtise, avec des conneries qui ne reflètent en rien la réalité des choses.

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