Journée étrange : autant le « cinéma » des non-Colombiens, depuis six ans, m'a périodiquement agacé, autant je me réjouis, depuis hier soir, de la libération d'Íngrid Betancourt et de quatorze de ses compagnons de captivité, à la suite de l'Operación Jaque (« Opération Jaque »).
Pour des raisons humaines, en premier lieu. Ces quinze personnes, quoi qu'on puisse dire, vivaient un calvaire, avec une épée de Damoclès suspendue, depuis des années, au-dessus de chacune de leurs têtes.
Parmi les autres motifs de réjouissance, il y a le dépit que doivent ressentir certains, face au triomphe moral d'Álvaro Uribe (le président colombien), qui est éclatant. J'imagine bien le dépit de quelques Hugo Chávez (le président vénézuélien), Rafael Correa (le président équatorien) ou Nicolas Sarkozy (est-il besoin de le présenter, celui-là ?), mangeant leurs chapeaux en voyant la récompense magistrale accordée à la stratégie de fermeté suivie, depuis 2002, par le président colombien (qui avait tout de même quelques raisons personnelles pour le soutenir dans la voie qu'il s'était tracée, si l'on songe que son propre père fut assassiné par les Forces armées révolutionnaires de Colombie).
Puis, dans ce monde où l'on a cherché à tout prix à placer l'Homme à une place supérieure imméritée, effaçant jusqu'à toute idée de transcendance (Dieu, toussa...), quel plaisir que d'entendre Íngrid Betancourt, durant les douze minutes de ses premières déclarations au pied de l'avion, invoquer sans cesse le nom du Seigneur. Certes, elle est Sud-Américaine, et les Sud-Américains, pour diverses raisons, sont réputés, à tort ou raison, « bigots » dans nos pays de mécréants. Mais il faut quand même se souvenir que, croyante ou pas, elle était tout de même, au moment de sa capture par les FARC le 23 février 2002, le fer de lance du Partido Verde Oxigeno, une formation politique clairement engagée du côté des ennemis de toute transcendance.
Au-delà du miracle, évoqué à plusieurs reprises par l'ex-candidate à l'élection présidentielle colombienne de 2002 dans ses déclarations, le vrai miracle est peut-être là : dans ce retour au premier plan de l'idée de transcendance. Avec quelques indices supplémentaires allant dans ce sens, d'ailleurs, mais ne mâchons pas le travail de réflexion des éventuels lecteurs...
Il y a aussi le bon sens populaire, en France, qui, au-delà de la récupération de ce moment historique – et dont on est bien loin d'avoir encore mesuré toutes les conséquences –, ne se laisse guère duper par la mise en scène sarkozienne au palais de l'Élysée, hier soir, avec la participation naïve des deux enfants de l'« otage vedette » : les gens sentent bien, dans leur immense majorité, que les gesticulations des politicien sfrançais n'ont joué aucun rôle réel dans l'heureux dénouement survenu hier, mais que celui-ci doit tout, au contraire, à la détermination constante du président colombien, qui ne s'est jamais laissé imposer une conduite malgré les innombrables pressions qu'il a pu subir ces dernières années, de la part de l'Internationale Bien-Pensante, pour accorder un brevet d'honorabilité aux terroristes.
Uribe a tenu le cap, et il a eu raison : le temps travaillait pour lui, depuis 2002. Mais qui, en Europe, souhaitait par exemple s'interroger sur la signification de simples chiffres, comme ceux des scrutins présidentiels de 2002 et 2006 ? Ils étaient pourtant riches d'enseignements.
Contre toute attente, le 20 mai 2002, Uribe avait réuni sur son nom 5 862 655 voix, soit 53,05 % des suffrages exprimés, pour une participation qui n'avait pas dépassé 46,47 % des inscrits.
Quatre ans plus tard, le 28 mai 2006, le président, resté ferme sur sa ligne durant le premier mandat, « grimpait » allègrement à 7 363 421 voix, soit 62,20 % des suffrages exprimés, tandis que la participation subissait une légère érosion, avec 45,1 % des inscrits.
Cela tendait quand même à démontrer une certaine adéquation entre l'homme d'État et son peuple, mais qui a eu envie de remarquer ce genre de choses, au sein de l'Internationale Bien-Pensante ? Pensez donc, un homme ne cachant pas ses sympathies droitières... Alors qu'à côté il y avait ces « héros » de gauche qu'auraient été les Chávez et Correa. Eh bien ils ont bonne mine, les « héros », aujourd'hui, avec leur soutien constant aux terroristes des FARC, obligés désormais de se dédire, comme le Vénézuélien, en appelant ses protégés à déposer les armes.
Mais revenons aux autres motifs d'amusement, cette fois dans le Bistro de Wikipédia. Peut-être sidéré par la tournure des événements (pensez donc, une libération d'otages qui s'est faite sans tirer un coup de feu, mais en recourant à une ruse formidable, c'est quasiment immoral), un contributeur est allé jusqu'à dire (à croire que c'était une plaisanterie, mais j'ai quelque doute là-dessus...) : « une fois qu'on a analysé le récit et compris que ce qu'on nous raconte est improbable, on ne peut manquer de se demander combien de millions (de dollars) ont reçu les preneurs d'otages... ». T'as qu'à croire...
Alors il a pu tomber des cordes sur l'Auvergne depuis hier soir, la température a pu chuter de dix degrés en une nuit, la journée n'en est pas moins bizarrement ensoleillée, derrière les nuages, la joie irradiant aux endroits les plus improbables...
Gribouille 223 – recette d’un désastre
Il y a 1 an
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