jeudi 10 juillet 2008

Culture de mort

Intéressante définition de la culture de mort, ce jour, sous la plume de Jeanne Smits, directeur de la publication et de la rédaction du quotidien Présent, en page 2 du no 6629, daté du vendredi 11 juillet 2008, sous le titre « “Culture de mort” : En réponse à Georges Dillinger » :
« Culture de mort » : cela voulait dire, me semble-t-il, dans l’esprit de Jean-Paul II, la recherche de la mort pour elle-même, le patient labourage dont elle est le fruit amer, la mise en mouvement des lois et des volontés pour rendre son emprise toujours plus universelle. Mort des hommes et mort des enfants à naître, mort des intelligences et mort des âmes, de la mort de l’innocence cultivée par l’école jusqu’à la mort des plus faibles organisée et projetée par les plus officiels des textes « bioéthiques ». C’est la mort de la culture elle-même, par l’assassinat de la beauté, du sens du bien et du mal, de la vérité même – et de Dieu.

Loin d’un glissement sémantique qu’il faudrait déplorer, j’y vois la description sans appel d’un monde où, non seulement l’on méprise les lois de la bonté et de l’être, chose somme toute banale, mais où la cité elle-même s’organise en vue d’obtenir toujours plus de mort.
Le billet de Jeanne Smits est sensiblement plus long – cinq paragraphes – que ce que j'en rapporte ici. Il vient en réponse à une intervention de Georges Dillinger, chroniqueur régulier dans les colonnes de Présent, dans un billet paru la veille, où il s'élevait, à titre personnel, contre l'emploi de l'expression « culture de mort », même popularisée par Jean-Paul II.

Georges Dillinger expliquait ainsi que, selon lui, dans toutes les acceptions courantes, le mot « culture » désigne un phénomène d'enrichissement, que l'on parle du sens premier, relatif au travail de la terre, ou de tous les sens dérivés, qui ont trait à l'esprit et enfin, par dérivation, aux comportements et phénomènes de société. Le chroniqueur estimait ainsi que, dans tous les cas de figure existait une connotation soit positive, soit neutre, à la différence des emplois de l'expression « culture de mort », chargés de « négativité » et d'« infamie », ce qui le conduisait à vouloir privilégier, pour sa part, le concept d'« idéologie de mort », pour éviter ce glissement sémantique vers toujours plus de néant.

Pour qui souhaiterait creuser la question, on peut renvoyer à la lecture de la lettre encyclique de Jean-Paul II, Evangelium vitæ, publiée le 25 mars 1995, et notamment à son premier chapitre : « La voix du sang de ton frère crie vers moi du sol : Les menaces actuelles contre la vie humaine » (dans la version originale en latin : Vox sanguinis fratris tui clamat ad me de agro: Hodierna vitæ humanæ intentata pericula).

On y constatera que défunt souverain pontife, s'il employait également des expressions comme « guerre des puissants contre les faibles » – en latin  : de potentium contra imbecillos bello –, ou « conspiration contre la vie » – en latin : coniurationis contra vitam –, faisait le choix de recourir à six reprises (1) à l'expression « culture de mort », pour l'opposer à trois reprises à la « culture de vie » (2).

Je serais mal placé pour prétendre expliquer le dessein de Jean-Paul II, mais pourquoi m'interdirais-je de délivrer mon sentiment, à savoir que cette grande figure morale qu'est le pape polonais a choisi avec soin les termes employés, peut-être pour donner à ses ouailles une arme de combat spirituel, avec cette opposition délibérée, en matière de vocabulaire, entre la « culture de vie » et la « culture de mort ». Je peux en tout cas témoigner personnellement de la force signifiante que peut revêtir cette expression même chez ceux qui n'ont pas la chance d'être catholiques ni même chrétiens...

Voir par ailleurs le site Web du quotidien Présent : abonnement électronique mensuel de 17 euros/mois, librement reconductible, ou abonnement électronique annuel de 181 euros, sans parler des abonnements à l'édition imprimée.

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