vendredi 15 octobre 2010

« Mon journal offert » : dérisoire, mesquin et malsain

Tout est dans le titre. Pour la deuxième « saison » consécutive, le ministère français de la Culture et de la Communication participe, aux côtés de 62 journaux quotidiens, à une opération de prétendue valorisation de la presse quotidienne, via l'offre de 200 000 abonnements d'un an à un quotidien de son choix, une fois par semaine, aux jeunes de 18 à 24 ans résidant en France.

La chose est censée traduire en actes la conclusion des états généraux de la presse écrite, le 23 janvier 2009, à l'issue desquels le président de la République avait retenu la proposition suivante : « Permettre à tout jeune de 18 ans de bénéficier, l’année de sa citoyenneté, d’un abonnement gratuit à un quotidien de son choix ».

Dérisoire ? Oui, parce que n'importe quel internaute — et pas seulement les jeunes majeurs à l'orée de leur citoyenneté — est techniquement en mesure, via certains forums de partage de fichiers, d'accéder rapidement et tout aussi gratuitement à des copies — certes illicites, mais sans le moindre risque personnel, puisque il n'y a pas recours aux protocoles de peer-to-peer — à des dizaines de quotidiens, hebdomadaires, bimensuels, mensuels, etc. en langue française, ainsi qu'à de nombreux ancien snuméros.

Mesquin ? Oui, puisqu'on appâte inutilement le chaland avec une proposition qui ne tient pas ses promesses. « Permettre à tout jeune de 18 ans de bénéficier, l’année de sa citoyenneté, d’un abonnement gratuit à un quotidien de son choix » laissait à penser au lecteur que l'abonnement promis serait un abonnement de plein exercice, et pas un abonnement limité à un numéro par semaine (le jour, fixe, étant de surcroît choisi par le staff du quotidien choisi) et que seules les 200 000 premières inscriptions sur le site Mon journal offert seront prises en compte.

Malsain ? Oui, pour toutes les raisons déjà indiquées ci-dessus. Mais aussi parce que les responsables politiques impliqués dans cette farce grotesque essaient de donner l'impression qu'ils s'intéressent aux jeunes, à leurs aspirations, à leurs espérances, etc., quand, da,s le même temps, ils ne tiennent absolument pas pas compte du fait que des centaines de milliers de ces jeunes n'hésitent pas à braver la loi en allant télécharger, via les protocoles peer-to-peer ou les sites de téléchargement direct, les musiques, films, séries télévisées, livres, logiciels, etc., adaptant au passage leur comportement aux coups de mentons hadopiesques et abandonnant en masse Emule et les logiciels de Torrent pour se reporter sur les sites de téléchargement direct, là où leurs activités de leechers et de seeders seront moins visibles des rapaces des majors et de leurs sbires politiciens.

Quel gâchis, au passage, si l'on songe que les socialistes, quant à eux, ont depuis longtemps pris en compte la donne liée aux habitudes de prétendu piratage — le partage de fichiers sur Internet — et ont proposé un système de financement et de rétribution des auteurs via une taxation des abonnements Internet. Personne n'est jamais venu prouver que leur proposition n'est pas viable. Alors que tout a déjà démontré, et viendra encore démontrer, que les âneries répressives « à la Hadopi » ne résoudront strictement rien, coûteront cher au contribuable et n'éradiqueront absolument pas les habitudes de partage des internautes.

Il faudrait un Hercule contemporain pour nettoyer les écuries d'Augias de cette classe politique qui ne comprend rien à rien. Que ce soit dans ce domaine ou dans d'autres qui défraient la chronique.

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